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Comme beaucoup de lecteurs, j’ai fait connaissance avec Pierre Lemaître grâce à son roman « Au-revoir là-haut », prix Goncourt 2013, et j’ai lu toute la série historique qui a suivi, de façon un peu décousue en lisant à saute-mouton, mais ce n’est pas bien grave, car ses romans peuvent se lire indépendamment les uns des autres.
Puis ayant tout lu, jusqu’à « Le silence et la colère » il y a quelques mois, je me suis dit que je n’allais pas pouvoir attendre encore un an la suite, et me suis plongée dans ce que faisait Pierre Lemaître à l’origine, à savoir des polars !
Son 1er livre, écrit en 1985 mais publié seulement en 2021, s’appelle Le serpent majuscule.
Et c’est fou que cette œuvre de jeunesse, comme il dit, contienne déjà tout ce qui fait son style. C’est décalé, déjanté, drôle, politiquement carrément incorrect, ça dézingue à tout va, mais tout en restant étonnamment élégant, et j’avoue, j’ai aimé qu’une femme soit l’héroïne du roman… surtout qu’elle exerce une profession toute particulière… 🔫
Mathilde, dont on fait connaissance dès le début du roman, est une sexagénaire replète, habitant près de Melun, dans une belle maison de campagne, veuve digne du Dr Perrin, mais n’aimant pas particulièrement leur fille, ni les enfants de celle-ci d’ailleurs, grande fan de chaussures, adorant manger et surtout n’importe comment, parlant facilement toute seule, râleuse, et terriblement attachante ! Signe super particulier… elle sait magner la gâchette, et connait sur le bout des doigts pas mal d’armes… car elle est tueuse à gages ! Ancienne résistante, ancienne beauté faisant tourner les têtes, elle est par-contre encore terriblement à l’aise pour démantibuler les cibles de ses contrats, sans jamais se faire prendre !

Dès le début du roman, elle tue un homme d’affaires sur une belle avenue parisienne, de nuit, tout tranquillement, en rentrant d’un week-end chez son empotée de fille, comme vous rangeriez votre valise au retour de vacances. Elle a néanmoins depuis quelques temps tendance à tirer 2 fois, ce qui commence à agacer le DRH de son agence, et son chef, Henri Latournelle, dont elle a été amoureuse autrefois. ❤
Puis elle mène à bien un autre contrat, tuer une étudiante prostituée, mais ensuite, elle commence à dérailler, puis à trucider les mauvaises personnes… ce qui ne passe évidemment pas inaperçu auprès de son équipe, qui commence à la trouver gênante.
Et la police dans tout ça ? Ah oui, aussi, mais bon, ils ne sont pas très doués ! Il y a bien l’inspecteur Vassiliev, dont on suivra l’enquête pendant quelques temps, et même le début d’une amourette avec l’employée de son mentor, mais il ne pourra pas aller jusqu’au bout… ni de l’enquête ni de l’amourette, d’ailleurs !

Mathilde est folle ! Mais bon, je ne connais aucun tueur à gages, alors j’imagine que s’amuser à jeter l’arme qui a servi à chaque mission dans la Seine mais toujours d’un pont différent, comme une discipline, ou être ébahie par des sacs mortuaires qui peuvent faire le vide pour éviter les odeurs, doit être normal quand on a fait du crime sa profession. 🤭
C’est marrant, car tout en étant assez pataude, et passant pour tout le monde pour une gentille dame fatiguée et plutôt molle, elle reste super vive et capable de déjouer tous les pièges que lui tendent d’autres tueurs à gages. Une vraie pro !
Elle manie aussi très bien l’auto-dérision, l’ironie, c’est une sacrée bonne femme ! Vous allez l’adorer ! J’ai quand même eu, c’est vrai, un peu de peine pour certaines personnes qui ont croisé la trajectoire de ses flingues, je ne croyais pas que Lemaître oserait, mais c’est un polar, quoi ! On ne s’ennuie pas, qu’on soit dans l’action, ou dans sa tête. 😀
J’ai ri ! 😄 J’adore quand elle parle toute seule, en l’occurrence pour s’adresser fictivement à son chef Henri, quand elle imagine les dialogues qu’elle pourrait avoir avec lui, ou encore quand elle parle à ses chiens, ou à son voisin de jardin.
Il y a pour l’entourer, de beaux personnages, comme le mentor de Vassiliev, ancien préfet commençant à perdre la boule, et à qui on devrait déconseiller la conduite, Henri, bien sûr le chef de Mathilde qui lui aussi a eu une grande attirance pour elle mais surtout une grande admiration pendant la guerre, et le voisin donc, Mr Lepoitevin, passionné par son potager et ne manquant pas de lui offrir des tonnes de courgettes ou de poires, ce qui m’a agacé autant qu’elle. 🍐
On suit sa vie pendant une semaine, qui plus est, on est dans mes années chouchoutes, les années 80, et j’ai aimé jusqu’au bout. Je vais lire les autres polars de Lemaître, ça promet !
J’adore les livres audio et donc j’ai « écouté » celui-ci. J’avais adoré que ce soit l’auteur qui fasse lecture de sa collection des Enfants du désastre puis des Années glorieuses, mais je dois dire que pour le Serpent majuscule, Nicolas Djermag s’en sort avec brio pour la lecture, il sait rendre hommage au texte de Lemaître, c’est vivant, enlevé, et super amusant !
En vente dans toutes les bonnes librairies indépendantes. ;)

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