Podcast de cet article ici 👇🏻
Aujourd’hui je vous parle d’un livre de photos qui m’a fait grande impression.
Comment j’ai découvert ce livre :
Il y a quelques temps, j’ai été attirée, dans la devanture de la librairie Le Grain de Mots, à Montpellier par cette magnifique couverture de nature, par la photo de la verrière envahie de plantes vertes, puis le titre a fait tilt presque simultanément… Green urbex.
De quoi y parle-t-on ?
Qu’est ce que l’urbex ? C’est une contraction de l’anglais urban exploration, « exploration urbaine » en français. Et ça consiste à visiter des lieux abandonnés. Tout y passe : maisons, châteaux, usines, écoles, thermes, ici ou ailleurs. Il y a des stars de la discipline, et ils sont connus grâce aux réseaux sociaux, bien sûr.
Une activité pour aventuriers modernes, bien souvent illégale, car elle consiste à entrer dans des propriétés privées, et c’est quand même bien dangereux, puisqu’il y a souvent péril en la demeure, au sens propre du terme… 🏚
On a pourtant tous fait ça, jeunes, en tout cas, moi oui, entrer dans des maisons abandonnées du village, entrer dans le jardin du manoir, aller dans des greniers inoccupés, mais là ça prend une bien grande dimension, on va aller jusqu’à parler de visiter Tchernobyl ! 🏭
J’aime l’urbex car souvent il en découle de belles photos, mais je ne connaissais pas du tout l’auteur, qui est photographe, Romain Veillon. Parce que ce n’est pas le tout de nous montrer des endroits souvent fabuleux, il faut aussi nous les montrer de façon à les sublimer.
Par-contre, j’avais bien repéré que la préface était écrite par Sylvain Tesson, dont j’aime les écrits, et les passages dans mon émission favorite, La Grande librairie. 📺
Dans ce livre, l’urbex est vert ! A savoir que l’auteur veut mettre en avant par ses photos, que la nature reprendra bien vite ses droits après notre disparition. Donc c’est surtout vert par le fait qu’on n’y sera plus, comme une écologie de l’extrême ! 🌲🌳
Je ne vais pas paraphraser Tesson, je vais carrément vous reproduire quelques lignes : « Romain Veillon, quoique artiste photographe, écrit de fortes pages archi informées sur le scénario post-apocalyptique. Il détaille les séquences de ce qui se passera sur le plan biologique après la grande « demolition party » planétaire en 3 temps : l’abandon, le pourrissement, et le retour de la nature… Romain Veillon détaille et illustre les grandes étapes de la reprise de contrôle de la terre par le règne végétal une fois le cosmos débarrassé de son occupant le plus bruyant et le plus génial : cet animal sans animalité nommé homme ».
Ma lecture :
C’est passionnant, et fait vraiment réfléchir à l’humain, à l’écologie, à notre petitesse, et c’est comme si quelqu’un avait déjà fait des photos de ce qui se passera ensuite, ça vrille un peu la tête !
L’auteur explique et montre, grâce à l’urbex, comment au fur et à mesure de la désertion de l’homme, les bâtiments vont évoluer. D’abord rien, puis un peu de poussière, puis des morceaux de plafond qui se décollent, puis ceux-ci s’effondrent, les plantes qui commencent à rentrer, la rouille qui s’installe, les métaux qui explosent, etc. etc.
C’est un livre que je parcours encore et encore, qui me fait voyager mais aussi réfléchir. Je suis absolument stupéfaite et fascinée par le nombre de lieux abandonnés sur cette terre : des villas extraordinaires en Italie, des brasseries, des tribunaux, des théâtres, des entreprises, des monastères, etc.
On peut ne regarder que les photos, ou bien on peut aussi voir « derrière ». On peut avoir l’impression de lieux vides, aussi bien qu’on peut avoir l’impression que des gens viennent de les quitter mais pourraient revenir. Dans les bâtiments vides, on trouve énormément de traces de vie. C’est d’ailleurs ce qui me laisse coite, si je peux dire, ce sont les éléments de décor quotidien comme un bouquet de fleurs séchées au milieu d’une table dans un hôtel en Allemagne, ou un chevalet qui semble attendre l’artiste qui viendra terminer le tableau commencé.

Les serres n’ont jamais été aussi fournies, (comme sur la couverture du livre), les plantes du dehors rentrent à l’intérieur et vice-versa, la structure en verre est maintenant habillée de feuillage.
Les prisons, elles, n’ont besoin de personne, dans un monde idéal, mais où sont les gamins des colonies de vacances ou ceux du parc d’attraction, dont les ballons perdus au fond d’une rivière artificielle asséchée semblent avoir été laissés là seulement l’été dernier ?
Où sont ces gens ? Bien sûr je me doute que souvent à la fin d’une succession mal réglée, ou longue, une maison peut attendre ses nouveaux propriétaires. Bien sûr je me doute qu’une clinique peu rentable doit à un moment fermer ses portes, qu’un parc d’attraction dont le loyer est trop élevé, et qui n’a pas su se renouveler sera abandonné.
Mais que pensent les hommes et les femmes, quand ils ferment la porte pour la dernière fois ? Qui sont les dernières personnes à avoir laissé ces queues de billard en plein milieu du jeu ? Qui est cet enfant qui a laissé cette bouée dans cette piscine intérieure d’un magnifique manoir ? Qui est le médecin qui a laissé son pied à sérum au milieu de la pièce et cette béquille dans un coin ?
Les très photogéniques jardins, serres et parc d’attraction, semblent parfois être devenus des installations de Land Art, tellement la nature a repris ses droits en beauté. Tapis de mousse, plante qui vous font des coucous par les fenêtres, impression de nids d’où émergent des châteaux, ou même d’un nouveau papier peint vivant !
C’est souvent onirique, cela peut être aussi brutal, surtout si vous lisez bien les textes entre les chapitres.
Un livre qui me laisse vraiment rêveuse. Le temps est élastique et c’est vraiment fascinant ! A bientôt pour une prochaine lecture. :)

Laisser un commentaire